Bilan de la présidence française de l'UE

Dans deux semaines, Paris cèdera son siège à Prague à la tête du Conseil de l’UE. L’occasion de faire un petit bilan des 6 derniers mois de Nicolas Sarkozy. Quelques amis m’avaient demandé en juin dernier ce que j’attendais de cette PFUE: « rien! » Avec mon complément de réponse: Sarkozy est gentil, mais m’agace chaque fois qu’il réaffirme le besoin de contrôler la BCE, chaque fois qu’il expose son arrogante omniscience franco-française. Surtout, Sarkozy me dérange dans son approche franco-allemande avec sa fâcheuse tendance à vouloir faire copain-copain bisou-bisou avec le voisin allemand, surtout après lui avoir balancé de belles saloperies trois ans plus tôt. Mais revenons à nos moutons, quel bilan tirer de cette PFUE? J’ai retenu six points clés:

1. Traité de Lisbonne
2. Union pour la Méditerranée (UPM)
3. Réduire les émissions de gaz à effet de serre
4. Apporter une solution européenne à l’immigration
5. Politique agricole commune
6. Communiquer autour de l’Europe
7. Gestion des crises

1. Traité de Lisbonne

A peine arrivée à la tête de l’UE, Paris se prend le non du peuple irlandais au traité de Lisbonne. Comme en 2005, l’UE est dans la m… et la France avec! Comme pour feu le TCE, les chefs d’Etat anti-européens auront fait des pieds et des mains pour geler les ratifications, Pologne et République Tchèque en tête. Après 6 mois de pause forcée, les Irlandais vont revoter pour quelque chose qu’ils ont déjà refusé. Il n’en fallait pas moins pour revigorer les nonnistes auxquels je me joins exceptionnellement pour dénoncer ce déni de démocratie qui fait bien peu honneur à notre continent. Je repose au passage la question qui fâche: quand supprimera-t-on enfin ce satané conseil de l’UE qui décide du sort de l’Europe seul dans son coin?

2. Union Pour la Méditerranée

C’était la marotte de Sarkozy. Sur le papier, un beau projet pour réconcilier les rives nord et sud, un titre pompeux à souhait pour ce qui n’est finalement qu’une remballe du processus de Barcelone lancé en 1995, délaissé depuis. Cette UPM ne devait initialement réunir que les pays européens ayant un pied dans la Méditerranée. Logique. Finalement, c’est toute l’UE qui est engagée dans ce merdier processus. Comme si la Finlande avait un intérêt dans l’UPM… Les premiers mois d’existence de cette UPM auront été prolifiques: on sait désormais que le siège est à Barcelone et que sa présidence sera tournante à 2 têtes avec 5 secrétaires généraux. Un beau « machin » en somme! Cela fera quelques chômeurs de moins…

3. Energie-climat

Officiellement, la PFUE aura arraché un compromis in extrémis pour réduire de 20% (par rapport à 1990) les émissions de gaz à effets de serre d’ici 2020. 12% pour faire simple… On est loin des 30% recommandés dans la feuille de route. Officiellement, l’UE aura résisté au lobby allemand des constructeurs automobiles, mais aussi et surtout à la Pologne qui défendu jusqu’au bout ses centrales à charbon ultra-polluantes. Dans les faits, 2/3 de cette réduction se fera par l’achat de crédits carbone sur le marché international sur le principe du pollueur payeur: j’ai le droit de polluer chez moi puisque j’investis écolo chez le voisin. Après déduction, l’UE ne réduira ses émissions que de 4%! Pas de quoi pavoiser, pas de quoi occulter les égoïsmes nationaux qui continueront encore gaiement à polluer pour préserver leur économie à court terme. Le réchauffement climatique peut bien attendre une crise financière…

4. Immigration

Il en aura fallu du temps à Sarkozy pour comprendre la nécessité d’une politique d’immigration européenne (cf. article sept. 2006). Le pacte européen sur l’immigration est désormais signé avec notamment l’organisation commune de l’immigration légale. Il n’y a plus qu’à attendre de voir des visas européens pour les étrangers et non des plus des visas nationaux alors que Schengen a aboli les frontières depuis des années!

5. PAC

On nous promettait un « bilan de santé », on l’a eu. Maintenant qu’on a bien bavardé autour d’un café, on pourra peut-être discuter de l’évolution concrète de la PAC à l’horizon 2013.

6. Communiquer autour de l’Europe

C’était la partie paillettes. Il y aura eu la tour Eiffel éclairée aux couleurs européennes et de nombreuses conférences organisées un peu partout en France. N’habitant pas en France, je ne peux que jeter un œil extérieur. Je retiendrai surtout la démarche « Paroles d’Européens » qui a traversé 6 villes de France. Sans passer par Strasbourg… On parle bien d’Europe?! Après tout, un Parisien ou un Marseillais a plus à apprendre qu’un Strasbourgeois.

7. Les crises

Une quasi-bénédiction pour cette présidence. En Géorgie tout d’abord où la France a joué avec succès les messagers de la paix au nom de l’UE. C’est bien. Ensuite la crise financière. Certes, il y aura eu beaucoup d’agitation (notamment le G20 de toute façon stérile sans la présence du futur président Obama), des solutions imparfaites voire parfois injustes, mais l’esprit européen semblait réellement habiter le président Sarkozy comme jamais auparavant et ça, on ne peut pas le lui reprocher. Double bon point.

Bilan

« Nous avons été bien au-delà des objectifs que nous nous étions assignés » résume ainsi le président Sarkozy. Belle marque de modestie!

Je garderai une image plutôt positive de cette PFUE, en grande partie grâce à sa bonne gestion des crises géorgienne et financière. J’attribue l’échec du traité de Lisbonne davantage à la Commission Barroso qu’au Conseil. Pour le reste, je n’aurai malheureusement guère changé d’avis sur Sarkozy l’Européen qui aura fait un assez bon boulot, mais devra gommer certains défauts s’il veut rempiler. Ce même Sarkozy qui se disait futur président des droits de l’homme avant de se rendre « au nom de l’UE » à l’ouverture des J.O de Pékin en août dernier… quand la plupart des responsables européens la boycottaient. Tout ça pour se faire insulter aujourd’hui par la Chine parce qu’il a rencontré le Dalaï Lama! Autre méfait: son torpillage récent de l’amendement 138 en catimini est bien peu glorieux et renforce l’idée tenace d’une Europe à démocratie variable. Heureusement pour lui que seuls les blogs orientés web en ont parlé…

Finalement, cette présidence européenne, malgré ses carences, aura redoré le blason de la France. Quant à Sarkozy, pour la première fois, je lui reconnais une certaine honnêteté malheureusement entachée de défauts rédhibitoires. Il y aura encore du travail pour avoir la carrure d’un Guy Verhofstadt ou d’un Jean-Claude Juncker.

2 réflexions sur « Bilan de la présidence française de l'UE »

  1. T’imagien Ced? La tour Eiffel aux couleurs de l’Europe !!! Je suis sur que meme pas en rêve tu l’as vu ça! 😉

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