497 millions d’euros (mars 2004) + 280,5 millions d’euros (juillet 2006) +..? Microsoft abuse de son monopole et Bruxelles veut le lui faire payer!
La semaine dernière, la commissaire à la concurrence, Neelie Kroes, a frappé fort: Microsoft devra payer une astreinte quotidienne de 1,5 millions d’euros X 6 mois (sanction rétroactive entre le 16 décembre 2005 et le 20 juin 2006). Astreinte qui pourrait monter à 3 millions d’euros par jour à partir du 31 juillet prochain si le géant informatique ne fournit pas d’informations assez complètes pour assurer l’interopérabilité entre les serveurs Windows et les serveurs « autres » qui ne parlent pas le langage Microsoft.
En mars 2004, Microsoft avait déjà été jugé coupable d’abus de position dominante sur le marché des systèmes d’exploitation, conséquence de ses méthodes commerciales peu orthodoxes, déjà jugées comme telles aux Etats-Unis. On ne remettra pas en doute la mauvaise foi de l’entreprise qui a plaidé l’incompréhension de la sanction auprès de la justice européenne. Verdict en attente qui n’invalide pas les sanctions dans l’immédiat.
L’affaire devrait s’arranger dans la mesure où « l’entreprise à l’écran bleu de la mort » met tout en oeuvre actuellement pour être en règle, tout en maintenant sa contestation en justice. Mais au delà de l’anecdote financière, ce procès souligne le problème de ce monopole dans un monde qui ne tournerait plus rond sans informatique.
En 2004, Bruxelles avait ordonné la suppression du Media Player de Windows sur les PC vendus en magasin. Executé, mais sans le succès escompté (cf. ZDnet). Et pour cause! Que fera un utilisateur novice d’un PC multimédia sans lecteur média? Il ne s’agit pas tant de reprocher à Microsoft une intégration de logiciels, par ailleurs de qualité moyenne, que l’impossibilité de les désinstaller. Ceux-ci, préinstallés par défaut, et donc utilisés par défaut, a fortiori en méconnaissance de logiciels équivalents meilleurs, maintiennent le monopole de la firme à l’écran bleu sur tous les tableaux.
Changer les habitudes
La médiocrité de Windows ou d’Internet Explorer n’est plus à démontrer. Si Bruxelles faisait fausse route? Faire payer une entreprise multimilliardaire ne changera pas son cours de bourse ni la face du monde qui utilise les produits « MS » tout en les critiquant. Car les alternatives existent, pour les serveurs comme pour les particuliers. Combien de personnes les connaissent? Firefox, le meilleur concurrent d’Internet Explorer serait désormais utilisé par près de 20% des Européens. Beaucoup d’Européens ne le connaissent donc pas encore ou le refusent, en particulier les entreprises. Pourquoi? De même que Mac OS X, reconnu comme le meilleur système opérationnel au monde par des experts en informatique, peine à séduire un public « windowsé » pourtant prêt à changer en mieux…
Vers le logiciel libre
Changer! Tel devrait être le slogan de la Commission. En juin 2004, Munich est devenue un cas d’école en annonçant la migration de son parc informatique vers Linux. Malgré les pressions diverses, malgré la visite exceptionnelle du patron Steve Ballmer. Le lobby informatique a depuis poussé pour faire voter une directive sur les brevets logiciels qui porterait un coup fatal aux logiciels libres. Projet rejetté par le Parlement européen en 2005.
Le débat avance en tout cas. Notamment autour du format ouvert ODF (Open Document Format) qui rendrait pleinement compatibles les fichiers sous MS-, Corel- ou encore Open Office mais supprimerait la main-mise des formats imposés par Microsoft depuis des années. La firme de Redmond, par peur de perdre l’administration belge a ainsi rejoint cette association. Condition sine qua non pour reconsidérer l’option MS en vue d’un renouvellement du parc informatique.
La Commission ne peut et ne doit légiférer en la matière. Mais elle aurait tout intérêt à promouvoir le logiciel libre en communiquant auprès des citoyens et des entreprises. Mais aussi et surtout en les intégrant le plus tôt possible dans nos systèmes éducatifs. En 20 ans, l’informatique est devenue autant un outil q’un élément culturel et historique. Il faut cultiver cette diversité informatique dès le plus jeune âge. L’Ecole n’aurait-elle pas un rôle à jouer? Quant à la Commission Européenne, le simple affichage d’un bouton de promotion de Firefox sur son site web ferait certainement bien plus de publicité, qui plus est positive, qu’un énième procès contre Microsoft. On devrait être libre de choisir Microsoft ou autre en connaissance de cause.
Demain, un champion européen de l’informatique?
Le problème Microsoft dépasse le cadre des systèmes d’exploitation. Plus généralement, l’idée de promouvoir les nouvelles technologies dans le cadre de la stratégie de Lisbonne est belle, l’imposer est délicate. L’Europe n’a jamais su créer de champion de l’informatique. Et ce ne sont pas nos quelques micro-Silicon Valley européennes, comme à Sophia-Antipolis, qui risquent d’influer sur le cours mondial. Côté web: zéro pointé. Côté hardware: le français Bull continue à traîner ses dettes sans que personne ne s’en émeuve, l’ancien géant italien Olivetti est mort. Côté software, l’Europe peut pourtant s’enorgueillir d’avoir donné naissance à Linux ou Skype. Le second vient d’être acheté par l’américain Ebay. Que deviendrait le premier avec une loi brevetant les logiciels? Racheté par le géant de Redmond en mal de créativité?
« Votre potentiel, notre passion »
D’ici là, Microsoft pourra toujours nous vendre des heures d’arrachage de cheveux et de crampes aux doigts à force de « Ctrl+Alt+Suppr ». Mais garderait-il cette passion si nous développions vraiment notre potentiel sous Linux ou sur Mac?
Je viens de lire que Microsoft, face aux exigences de Bruxelles pourrait
retarder la sortie de Vista en Europe.
Même si l’on peut reprocher pas mal de choses à Microsoft si Windows
représente 95% des systèmes d’exploitation c’est qu’il y a une raison !
Et franchement installer Realplayer, Firefox, Thunderbird, etc… n’a
jamais été un problème. C’est fou ce qu’en Europe on peut être jaloux
du succès des autres. Et Bruxelles qui maintenant veut tout régenter de
la taxe des restaurants (qu’ils nous interdisent de baisser à 5%) à ce
qu’ils pensent être bon pour un système d’exploitation. Ca suffit !
Ce qui est scandaleux c’est qu’un windows XP vendu 249 dollars aux US soit
vendu exactement 249 Euros, ce qui veut dire que nous payons, compte tenu
du change, 30% de plus ! On devrait payer 191 ! Mais ça Bruxelles s’en
moque.
Pourvu que Microsoft décide de ne pas commercialiser Vista en Europe, mais
seulement via la Suisse, la Norvège (voir le Liechtenstein) et au prix de
la licence américaine.
Encore une fois l’Europe risque grace à nos chers bureaucrates de
Bruxelles de prendre du retars en matière de nouvelles technologies.
AMicalement
Christian
Effectivement, je viens de lire le communiqué aussi. J’ai l’impression d’avoir manqué un épisode. J’aimerais d’ailleurs beaucoup connaître la raison si évidente pour laquelle Windows représente 95% des systèmes d’exploitation?!
Comme je l’ai souligné dans mon billet, le problème, à mon avis, n’est pas tant de proposer un package complet OS+navigateur web+lecteur médias, etc… que de les lier de façon irrémédiables et d’abuser d’un monopole pour les imposer (cf. IE vs Netscape) et ensuite les laisser en jachère puisqu’il n’y a plus de concurrence. Quelle innovation!
Installer des ersatz open source n’est apparemment pas un problème pour vous ni pour moi car nous connaissons un peu les différents porduits sur le marché, mais pour avoir informé beaucoup d’amis de l’intérêt du seul Firefox, je doute que le consommateur lambda ait vraiment conscience des choix qui existent. Plutôt que de charger la barque de MS, je pense qu’on pourrait contraindre la firme de Bill Gates à faire un peu la promotion des Firefox & Cie, dans une sorte de travaux d’intérêt général. MS ayant suffisamment de mal à finir proprement ses OS, cela serait bénéfique pour tous. Car la question n’est pas d’être jaloux mais de défendre la liberté de choix.
La question des prix que vous mentionnez ne dépend pas, à ma connaissance, du ressort de la Commission, mais de la politique tarifaire mondiale de l’entreprise, sur laquelle chaque Etat applique ensuite sa propre TVA. Demandez plutôt des comptes à MS France! MS n’est d’ailleurs pas la seule à agir ainsi. Apple en fait de même, et bien d’autres. Produit X vendu 500$ aux USA et 500€ en Europe… Je trouve cela assez déplacé aussi, mais je n’accuserai pas Bruxelles qui a le dos bien large…
Dernier point: Bruxelles souffre de bureaucratie, pour sûr, mais pas plus que l’Etat français qui reste son modèle de base! Pour rappel, l’histoire de la TVA sur la restauration comme d’autres points fiscaux sont des compétences qui ont été sciemment et délibérément déléguées par les Etats membres à l’UE. Aujourd’hui la France veut faire machine arrière, seule, et ne peut effectivement pas sans l’aval des autres Etats-membres. Ce qui crée une incompréhension en France, amplifiée par les (de plus en plus) nombreux eurosceptiques. Et comme notre cher Président aura dit tout et son contraire sur l’UE… Il est tellement plus facile d’accuser Bruxelles de tous les maux quand l’Etat français agit dans un sens et ne reconnaît pas ses actions a posteriori. Il est tellement plus facile d’accuser les autres quand on se sent impuissant. Ne tombons pas dans les clichés!